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Transporteurs : quels services digitaux attendent vos clients ? (1/2)

27 mai 2021 Luc Chambonnière

Les attentes des chargeurs en matière de transport ont largement évolué ces dernières années. Si les fondamentaux, au premier lieu desquels une prestation correctement effectuée, sont évidemment incontournables, ils ne suffisent plus. La transformation digitale du fret et ses promesses sont passées par là. Pour les transporteurs, c’est une opportunité de différenciation à saisir, pour peu de bien cerner le marché !

Longtemps, le transport de marchandises a été considéré comme une simple commodité par les donneurs d’ordres, avec des conséquences parfois dommageables pour leurs prestataires. La course au moins-disant tarifaire, souvent au détriment de la qualité et de l’étendue du service comme de la relation commerciale, a longtemps été la norme. Depuis quelques années, son rôle change et les attentes des chargeurs aussi. Amazon, pas franchement réputé pour sa courtoisie vis-à-vis de ses transporteurs, aura au moins eu pour mérite de révéler le plein potentiel d’un transport parfaitement optimisé. Et, surtout, de démontrer aux sceptiques l’intérêt capital d’investir lourdement dans la transformation digitale du transport. De plus en plus habitués aux performances amazoniennes en livraison, les attentes des clients particuliers ont largement cru et, conséquemment, celles des entreprises également.

Dans nos enquêtes annuelles sur la conjoncture du transport routier menée auprès des chargeurs, on voit que la qualité de service est désormais la première priorité des chargeurs, significativement devant les tarifs. C’est une première évolution, mais pas la dernière : bientôt, la qualité de service ne suffira plus. Car depuis maintenant plus de 5 ans, le marché du transport connaît une nouvelle vague de digitalisation : partout en Europe ont émergé des plateformes SaaS, proposant aux acteurs du marché une multitude de services. Du tracking à la dématérialisation, en passant par le pilotage de la performance ou l’internet des objets, les promesses sont nombreuses et alimentent là aussi les attentes des donneurs d’ordres.

Soyons francs, ces plateformes n’ont pas créé le besoin : elles ont répondu à un décalage, un manque. Très prosaïquement, pour beaucoup, les transporteurs ont loupé ce virage de la transformation digitale, et ces plateformes se sont emparées du sujet, flairant le bon coup. La partie est-elle perdue pour autant ? Pas du tout ! A vrai dire, on peut même dire que c’est le bon moment d’agir. Le développement de solutions en interne n’est plus franchement en odeur de sainteté : trop lourd à mener, trop complexe à maintenir. Il faut recourir au marché. Les solutions innovantes y étant présentes commencent justement à arriver à maturité et le marché lui-même est en voie de consolidation. D’ailleurs, de nombreuses plateformes ont été achetées, ces dernières années, par de grands transporteurs. Ce contexte de marché rend l’engagement dans une démarche de digitalisation moins risquée, car celle-ci se mènerait avec des partenaires plus fiables et plus solides. Mais, si c’est le bon moment, comment procéder ? Quelle feuille de route adopter ? Quels sont les axes à prioriser ? Où sont les attentes de vos clients ? Voici quelques propositions, non exhaustives mais reflétant notre expérience auprès des donneurs d’ordres.

1- La traçabilité

S’il ne devait y en avoir qu’une, ce serait bien la traçabilité. Et c’est logique : on sait que la qualité de service est la priorité absolue d’une grande partie des donneurs d’ordres. La traçabilité est au cœur, entre autres, de ce sujet. En effet, sans traçabilité, difficile de mesurer et donc d’analyser et de piloter la qualité de service. Impossible également de tenir informé le client du progrès de ses expéditions ou de sa livraison. Or, la transparence sur ce point est au cœur d’une expérience client réussie, notamment en B2C mais pas seulement. En effet, la livraison est de plus en plus centrale dans le regard que porte le client sur l’entreprise dont il acquiert les produits. Mais concrètement, quelle forme prend cette traçabilité dont on discute ?

Dans le transport de réseau, le fondamental est bien sûr la remontée EDI des statuts d’expédition. Alors, bien sûr, ce sujet n’est pas nouveau : ces remontées existent depuis les années 1980 et une bonne partie des prestataires concernés produisent cette information. Mais entre la produire et la partager efficacement, il y a un petit pas à franchir. En effet, beaucoup de transporteurs rendent cette information disponible sur leur portail. Or, la plupart des clients, en B2B, recourent à plusieurs transporteurs : il n’est pas envisageable de suivre les expéditions sur chacun des portails concernés. La bonne pratique, en la matière, consiste à injecter les données directement dans les systèmes d’information des donneurs d’ordres. Du reste, la qualité de la mise à disposition des remontées EDI devient un critère fondamental dans les appels d’offres transport menés par les donneurs d’ordres. Comme partout, la transparence est devenu une exigence.

Dans l’affrètement, l’axe principal de progression en termes de traçabilité prend plutôt la forme du tracking en temps réel. L’objectif est alors d’obtenir de la visibilité sur le parcours des expéditions et en particulier d’obtenir une heure de départ et d’arrivée (ETD et ETA). En effet, le transport de lot, par exemple, est réputé pour être une boîte noire, au sens informatique du terme : on sait ce qui s’est passé jusqu’au chargement, puis à partir du déchargement. Entre les deux, rien, aucune information. Côté chargeurs, dans ces circonstances, difficile de planifier ou de se préparer pour un retard. Ceux-ci sont donc assez naturellement en attente de solutions de la part de leurs transporteurs. Des solutions sur le marché se proposent d’exploiter, par exemple, l’informatique embarquée des véhicules pour offrir de la prédictivité sur l’heure d’arrivée. Une piste à explorer sérieusement.

2- La dématérialisation

L’administratif est rarement perçu comme une partie de plaisir. Les lourdeurs sont sans doute inévitables dans une profession aussi réglementée que le transport, mais il est néanmoins possible, et surtout souhaitable, d’alléger un peu la chose. En effet, un transporteur fluidifiant les interactions d’ordre « bureaucratique » avec son donneur d’ordre marquera clairement des points comparativement à un autre fonctionnant encore par fax ou papier. Ce n’est pas un scoop, mais la dématérialisation permet de faire gagner du temps, notamment en facilitant les échanges et transferts de documents.

Celle-ci doit se concentrer sur deux axes. D’une part, il s’agit de faciliter la mise à disposition des documents nécessaires au transporteur pour effectuer la prestation. Si la tâche incombe ici à l’entreprise donneuse d’ordres, c’est justement l’occasion d’apporter des solutions concrètes pour alléger son fardeau et, ce faisant, améliorer son expérience client. D’autre part, il faut également s’attaquer aux documents que le transporteur, cette fois, remet au destinataire, qu’il soit le donneur d’ordres ou non : preuve de livraison – qui peut avoir d’importantes implications fiscales, certificat d’origine…

Quoi qu’il en soit, le transport est une activité qui multiplie les parties prenantes pour chaque expédition et le donneur d’ordres est souvent au cœur de ce réseau. Il doit donc gérer un certain nombre d’échanges documentaires, et surtout communiquer un même document à plusieurs parties. Aussi, la dématérialisation ne consiste pas seulement à utiliser des documents au format numérique : ce sont les modalités de mise à disposition qui sont capitales. Multiplier les échanges de mails, et donc les doublons, ne rime à rien. Il faut privilégier un fonctionnement en plateforme collaborative, librement et facilement accessible à toutes les parties prenantes.

Voir la partie 2 de l’article